Hier encore le harcèlement scolaire – ou bullying – était un problème dont on ignorait l’importance et la gravité. Depuis une quinzaine d’années, ce phénomène est enfin reconnu comme un problème inquiétant, qui comporte des conséquences sociétales complexes et lourdes, notamment sur les droits de l’enfant. Une reconnaissance saluée !
Des clins d’œil complices et des sourires en coin aux violences physiques, en passant par toute la panoplie verbale de la mise à l’écart (moqueries, insultes, allusions désobligeantes) et par des moyens de déstabilisation psychique plus subtils et secrets (chantage, contrainte, rumeurs, silence, isolement) : rien n’est suffisant pour humilier un pair que l’on a désigné.e comme cible. La raison concrète de cette stigmatisation ? Cela peut aller d’un marqueur social interprété comme dévalorisant à un trait de caractère peu commun que les harceleurs.euses considéreraient comme « bizarre ». Ou encore d’une particularité physique laquelle serait un peu trop distinctive à un centre d’intérêt original et différent de celui des autres. Ainsi, un hobby un brin extravagant ou encore le fait de ne pas porter les « bonnes » marques de vêtements peuvent-ils, au même titre que l’obésité, le handicap, les taches d’acné ou les cheveux roux, déclencher des manifestations systématiques d’adversité et d’agressivité de la part de plusieurs élèves ou d’un seul individu
De graves effets
Selon la nouvelle définition du harcèlement de l’UNICEF : « Le harcèlement scolaire est un processus social né- faste qui se caractérise par une dynamique de pouvoir déséquilibrée, laquelle découle des normes sociales (sociétales) et institutionnelles. Les agissements sont souvent répétés et se manifestent par un comportement interpersonnel indésirable des élèves ou du personnel scolaire, qui cause un préjudice physique, social et émotionnel aux personnes ou aux groupes ciblés ainsi qu’à l’ensemble de la communauté scolaire »
Ce que souligne cette définition c’est que les effets sont graves pour la victime. Enfant ou jeune personne traversant l’âge fragile de l’adolescence, il.elle ne dispose pas des outils nécessaires ni pour affronter l’hostilité de ses camarades, ni pour puiser en soi suffisamment d’assurance pour se permettre d’y rester indifférent.e, en se montrant imperméable aux attaques et aux insultes des autres. À cet âge, on ne sait pas trop comment gérer les différences ou assumer les spécificités pour lesquelles on se trouve stigmatisé.e. On ignore aussi comment, à la rigueur, compenser son originalité par la valorisation d’une autre qualité, d’une caractéristique qui, quant à elle, est susceptible d’être approuvée et saluée, interprétée en termes d’avantage. Le harcèlement scolaire est sou- vent associé à une concentration en baisse, une motivation en chute libre, voire un décrochage scolaire.
Déjouer les mécanismes du harcèlement
Phénomène de groupe s’appuyant sur l’asymétrie de pouvoir et sur l’inéquation numérique, le bullying incite plusieurs personnes à s’acharner contre une seule victime. Le plus éprouvant pour cette dernière est de voir des ami.e.s, le plus souvent des jeunes eux-mêmes en mal d’intégration scolaire ou cherchant à plaire aux pairs plus « populaires », se joindre aux harceleurs.euses
Phénomène de groupe s’appuyant sur l’asymétrie de pouvoir et sur l’inéquation numérique, le bullying incite plusieurs personnes à s’acharner contre une seule victime. Le plus éprouvant pour cette dernière est de voir des ami.e.s, le plus souvent des jeunes eux-mêmes en mal d’intégration scolaire ou cherchant à plaire aux pairs plus « populaires », se joindre aux harceleurs.euses Heureusement, depuis une quinzaine d’années, ce qui pouvait auparavant être considéré comme de simples blagues ou taquineries entre élèves est aujourd’hui condamné par les institutions scolaires comme des actes graves qui entravent le droit à une éducation de qualité, inclusive et équitable.
Parallèlement à tout le travail de renseignement, d’information et de sensibilisation, des solutions pertinentes sont recherchées pour gérer les cas de harcèlement et des stratégies de prévention sont établies. L’ensemble des communautés scolaires, les organisations d’aide à l’enfance ou encore les poFormatlitiques s’impliquent de plus en plus dans cette recherche de solutions et dans l’effort de déjouer le jeu cruel du harcèlement et de l’intimidation. Le problème du harcèlement est un problème global, lequel ne fait pas de distinction du niveau de vie et du de- gré de développement économique. Lieu d’instruction, l’école est aussi l’espace où l’on apprend les bases du vivre-ensemble et où l’on reçoit ses premiers enseignements de tolérance et de respect d’autrui, ses premières leçons de citoyenneté. Il est désormais inconcevable que cet espace se prête, comme c’est parfois le cas encore aujourd’hui, à des dynamiques qui vont à l’encontre de ces objectifs essentiels de l’école.
Faire barrage au bullying, reconnaitre ses signes et prévenir, apprendre aux élèves le refus de s’affirmer par l’humiliation et par le piétinement d’autrui, voilà ce à quoi, parallèlement à ses objectifs concrets liés à la transmission du savoir, tend et aspire l’école du XXIe siècle. Pour faire face à ce défi, elle est loin d’être seule : les organisations de défense des droits de l’enfant sont là pour accompagner la lutte contre le harcèlement à l’école et permettre à tous les élèves, de grandir et apprendre dans des environnements éducatifs sains, protecteurs et libre de violence.
Des mesures concrètes
Un grand nombre d’initiatives sont mises en place par Terre des Hommes Suisse et ses partenaires visant à lutter contre le phénomène du harcèlement scolaire. Ces initiatives ont un dénominateur commun : poser les bases, dès les premières années de scolarité, d’une culture de paix et de recherche de compréhension en privilégiant les efforts de prévention, de dialogue, de communication non violente et de médiation. Une médiation moins centrée surle jugement et sur le blâme que sur l’objectif de maintenir la paix, pour le bien de tous. Par son activité de mise en place de « brigades de paix », de groupes d’autoprotection et d’autres mesures destinées à enrayer le phénomène du harcèlement, Terre des Hommes Suisse et ses partenaires tentent à faire de l’espace scolaire un lieu de vie collective harmonieuse, caractérisée par l’équilibre, par le bien-vivre et le bien-être des élèves, par leur épanouissement intégral.