Les photos de jeunes filles utilisées dans cet article sont des photos d’illustration et ne représentent pas nécessairement des jeunes filles mariées.
Aziz Ndiaye est membre du Conseil National des Enfants et Jeunes de Terre des Hommes Suisse au Sénégal. Jeune activiste, il s’est engagé et se bat activement contre le mariage des enfants dans son pays, pratique encore très prégnante dans cette société où le mariage apparait souvent, à tort, comme une solution à la pauvreté et pallier à leurs difficultés économiques. Témoignage.
Je m’appelle Aziz, je vis à Dakar au Sénégal. Dans mon pays, persiste une réalité déconcertante : le mariage des enfants. Ancré dans des siècles de traditions culturelles, ce phénomène demeure une ombre sur l’avenir de nombreuses jeunes filles. Les mariages précoces, touchant plus de 30% des filles au Sénégal (Source: UNICEF), résultent souvent de pressions économiques, où la dot devient un espoir financier pour des familles démunies. Les inégalités de genre exacerbées et le manque d’opportunités éducatives pour les filles contribuent également à cette pratique.
Cependant, au-delà des traditions, se cache une réalité brutale : le mariage des enfants a des conséquences désastreuses sur la santé, l’éducation et le développement social de ces jeunes âmes. Les pressions sociales et le manque de sensibilisation alimentent ce cycle vicieux. La lutte contre cette pratique exige une prise de conscience collective, des initiatives éducatives et des changements sociaux profonds. Il est temps de briser ces chaînes séculaires, d’émanciper nos jeunes filles et de construire un avenir où l’éducation prévaut sur la tradition, et où chaque enfant peut grandir libre, éduqué et prêt à façonner son destin. Comment peut-on parler de droits de l’enfant, de protection quand dans mon pays, en 2022, 8% des femmes de 20 à 24 ans ont été mariées avant l’âge de 15 ans ? (Source : UNICEF)
En tant qu’activiste je me suis rendu compte du rôle que je pouvais jouer afin de mobiliser la société et ce pour protéger notre jeunesse. La réalité alarmante à laquelle nous devons faire face nous concerne tous au Sénégal, garçons comme filles. Car même si ce sont les filles les premières touchées par ce fléau c’est toute une génération dont le développement et l’épanouissement sont entravés.
Pratique dévastatrice
Derrière ces statistiques se cachent des destins brisés, des rêves inaccomplis, et des vies altérées. Pour moi, il est de notre devoir en tant que communauté de mettre fin à cette pratique dévastatrice qui compromet notre avenir.
Il ne faut pas oublier que ces unions précoces ont des conséquences graves sur la santé des enfants, avec des risques accrus de grossesses précoces, d’accouchements difficiles, de mortalité maternelle et infantile, d’infections sexuellement transmissibles, y compris le VIH, ainsi que de violences sexuelles et domestiques. Ces unions nous privent de l’accès à l’éducation, compromettant ainsi notre avenir professionnel et notre autonomie financière. Les filles mariées tôt ont souvent des perspectives limitées, ce qui entrave le développement social et économique du pays.
Aujourd’hui je m’engage et veux faire entendre ma voix pour défendre les droits fondamentaux des enfants pour qu’ils puissent jouir pleinement de leur droit à l’éducation, à l’autonomie, et à un avenir sans les chaînes du mariage précoce. Je crois que nous devons ensemble, construire un avenir où chaque enfant sénégalais peut grandir libre, éduqué, et prêt à contribuer activement au développement de notre nation. Il est crucial que nos parents comprennent que marier une fille trop jeune met sa vie en danger, avec des conséquences graves sur sa santé physique et mentale.
Actuellement je m’investis pleinement dans une campagne pour le financement effectif du Plan National pour l’Abandon du Mariage des Enfants au Sénégal. Je plaide activement, pour l’abandon du mariage d’enfant au Sénégal et pour le relèvement effectif de l’âge du mariage à 18 ans. A l’issue de cette campagne les autorités ont initié des ateliers de réflexion pour mettre en place une stratégie de mobilisation de ressources de ce Plan National pour l’Abandon du Mariage d’Enfants avec l’appui des partenaires techniques et financiers.