Une histoire de courage, d’efforts et de combativité en réponse à la violence faite envers les enfants et les femmes en Colombie.
Une histoire de courage, d’efforts et de combativité en réponse à la violence faite envers les enfants et les femmes.
Des milliers de femmes colombiennes, devenues cheffes de famille suite au quasi-état de guerre civile ces trente dernières années dans certaines régions du pays, ont dû s’insérer dans le monde du travail. Dans les quartiers populaires de Bogotá, elles se sont organisées afin de garantir à tour de rôle la surveillance et la garde de leurs enfants. La Fondation d’Appui Communautaire (Fundac), née de ce mouvement, a acquis au fil des ans une position de leader dans la formation d’éducatrices et dans l’’aide au développement communautaire grâce à son sérieux et à la qualité pédagogique de son action. Actuellement, le réseau de Fundac comprend 18 centres infantiles répartis dans différentes localités de la capitale, qui accueillent 220 enfants âgés de 0 à 6 ans.
Terre des Hommes Suisse appuie cette organisation depuis de nombreuses années. D’abord dans les années 1980, à travers l’appui à Mafalda, l’un des centres infantiles du réseau, puis à partir de 2000 par le financement d’un volet de son programme de formation des éducatrices communautaires, et enfin depuis 2004 par le soutien à un projet spécifique de lutte contre la violence intrafamiliale et la défense des droits des enfants (projet soutenu par la Fondation Medicor de 2010 à 2012).
Résilience pour ces femmes éducatrices
La société colombienne est dominée par des décennies de conflits internes (guérillas, groupes paramilitaires, déplacements forcés, etc.) et les formes de relations ainsi que les normes éducatives sont essentiellement basées sur la violence. Avec ténacité, Fundac s’est engagée dans un modèle global de prévention de cette violence qui intègre notamment des aspects pédagogiques, psycho-sociaux et juridiques. Cette démarche a conduit à la création d’une formation dite mujer Escucha – femme qui écoute. Cette formation de plusieurs années prépare les éducatrices à leur rôle de médiatrice et d’appui aux familles, afin de les aider à trouver leurs propres réponses aux conflits familiaux et à identifier des conduites d’action. On l’imagine aisément, suivre ce cursus ne va pas de soi. Il demande un investissement personnel et une volonté d’apprendre et de transmettre pour mener de front vie privée, vie professionnelle et formation. Mais le bilan est positif! Les participantes y ont trouvé, outre des outils à une intervention de qualité, des clés de compréhension des schémas de violence dont elles ont été elles-mêmes les victimes. Car malheureusement, les mujeres escucha parlent aussi le plus souvent d’expérience. «La formation m’a aidée à comprendre la spirale de la maltraitance, rapporte l’une d’entre elles, et m’a donné les moyens de mieux l’aborder et de trouver des solutions sur le plan professionnel… mais aussi personnel».
Avec cette formation, les éducatrice, issues du même milieu socio-culturel que les bénéficiaires, peuvent à la fois saisir la profondeur, la complexité des problèmes et y apporter compréhension et réponses adéquates. Concrètement, il s’agit de savoir et pouvoir prêter une oreille, et de permettre aux victimes de verbaliser leur situation. La qualité de cette formation est reconnue bien au-delà du réseau, et des discussions sont actuellement en cours pour l’inclure dans un cursus académique, diplômant.
En début d’année, Fundac nous faisait part d’une nouvelle réjouissante: après des années de revendications de la société civile et d’incidence politique, le financement du préscolaire a enfin été pris en charge par l’Etat! Le soutien de Terre des Hommes Suisse à Fundac va donc se terminer fin décembre. Cette année 2013 a été consacrée à l’accompagnement de la réorganisation du réseau, une année importante pour cette association à forte identité communautaire qui est confrontée à des choix cruciaux pour son avenir.
Article rédigé par Jacqueline Haller, tiré du journal Terre des Hommes Suisse n°112, décembre 2013
