Depuis l’an 2000, date de l’adoption des objectifs du millénaire pour le développement (OMD), des progrès importants ont été enregistrés en matière d’accès à l’éducation primaire pour tous. Si le nombre d’enfants non scolarisés dans le monde a fortement diminué, on estime cependant que 57 millions d’enfants ne sont toujours pas inscrits à l’école; la moitié d’entre eux vit en Afrique subsaharienne. La scolarisation demeure donc une priorité pour les années à venir, l’accent devant être mis sur une amélioration de la qualité de l’éducation dans de nombreux pays.
En parallèle de l’éducation de base, une autre priorité a été inscrite à l’agenda international: la formation professionnelle. C’est l’un des objectifs de développement durable (ODD) adoptés par les Nations Unies en 2015et qui devraient guider le développement mondial pendant les quinze prochaines années. Le but est d’augmenter le nombre de jeunes disposant de compétences techniques et professionnelles afin de leur permettre d’obtenir un travail décent ou de se lancer dans l’entrepreneuriat.
Le contexte ouest-africain
Donner des opportunités de travail aux jeunes est essentiel partout dans le monde, et cette responsabilité sociétale constitue un enjeu majeur dans les pays où les enfants représentent pratiquement la moitié de la population. Ceci est notamment le cas dans les trois pays d’Afrique de l’Ouest où Terre des Hommes Suisse est active: le Burkina Faso, le Mali et le Sénégal. Une particularité démographique qui devrait continuer à caractériser cette région dans les prochaines décennies; avec un taux de fécondité déjà supérieur à la moyenne continentale, on estime en effet que d’ici 2050, la population de plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest aura plus que doublé.
Dans ce contexte, des centaines de milliers de jeunes arrivent chaque année sur le marché du travail, avec leur bagage d’espoir, leurs craintes et leurs envies. Trois partenaires de Terre des Hommes Suisse donnent à ces jeunes l’opportunité de concrétiser leurs rêves et d’assurer leur avenir.
Une expérience de formation duale
Active depuis de nombreuses années dans l’alphabétisation des adultes, l’organisation sénégalaise Alphadev a lancé en 2012 une nouvelle formation professionnelle, destinée à des jeunes déscolarisés ou analphabètes. Le programme, élaboré sur trois ans, a été pensé dans une modalité duale. Les adolescents, dont une majorité de filles, se retrouvent en classe tous les matins pour développer et renforcer leurs compétences de lecture et d’écriture, en français pour les plus avancés, en wolof pour ceux dont les bases scolaires sont moins solides. L’après-midi est consacré au travail dans des ateliers du quartier, sous l’œil de maîtres artisans. Grâce à la collaboration avec un lycée technique local, ces derniers ont bénéficié de conseils en matière de pédagogie, ce qui assure aux jeunes de meilleures chances de réussite. Ainsi, sur les soixante apprenants de la première volée, plus de la moitié a pu se présenter à l’examen officiel pour l’obtention du certificat d’aptitude professionnelle. Actuellement, Alphadev travaille avec une deuxième volée d’apprenants et les enseignements tirés de la première expérience vont permettre d’améliorer la qualité de la formation.
Le potentiel des filles
Au Burkina Faso, l’Association Tout pour Tous – Yennenga (ATTous) travaille depuis une vingtaine d’années
avec un public spécifiquement féminin. L’organisation s’est lancé le défi de montrer à la société burkinabé le potentiel des jeunes femmes pour le développement du pays, et de rappeler que leur apport ne doit pas
être confiné dans des stéréotypes de genre.
Ainsi, à côté d’une formation très prisée en couture, les deux centres gérés par ATTous proposent également des filières de mécanique, d’électricité automobile, d’électronique ou encore de carrosserie. Pour former des filles à des métiers traditionnellement considérés comme masculins, il est nécessaire d’anticiper les obstacles qu’elles pourraient rencontrer sur leur parcours et de les accompagner dans cette démarche. Des cours de développement personnel et d’entrepreneuriat sont ainsi intégrés au programme de formation. Ils aident les apprenantes à prendre conscience de leur potentiel et à renforcer leur estime d’elles-mêmes.
Avec le soutien de Terre des Hommes Suisse, ATTous offre également à ces jeunes un appui spécifique à l’insertion professionnelle, notamment à travers des stages en entreprise qui permettent aux filles de se confronter au monde du travail, et un appui à la création de micro-entreprises.
Encourager l’entrepreneuriat juvénile
«Un emploi pour tous»: telle est la divise de l’Association Jeunesse Action (AJA) qui siège à Bamako et qui, depuis 1994, œuvre pour la valorisation et l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes. Depuis 2015, avec le soutien de Terre des Hommes Suisse, AJA met à niveau les connaissances d’apprentis n’ayant jamais obtenu le certificat de fin d’étude primaire. Pendant une année, une soixantaine de jeunes suit des cours d’alphabétisation qui leur permettent de se familiariser à la lecture et à la rédaction, mais aussi des cours pour développer les compétences mathématiques nécessaires à la gestion d’une micro-entreprise.
Des méthodologies d’enseignement innovantes et axées sur la pratique professionnelle rendent cet apprentissage théorique plus motivant et plus concret. L’organisation malienne encourage également l’entrepreneuriat des jeunes: elle les accompagne notamment dans l’élaboration d’un plan d’affaire et dans les démarches pour l’obtention de crédit nécessaire au lancement d’une activité.
Différentes modalités, un seul objectif
Les enjeux liés à la formation professionnelle des jeunes en Afrique de l’Ouest sont multiples, et les difficultés peuvent sembler insurmontables. Les stratégies mises en place par nos partenaires démontrent cependant qu’il est possible d’offrir – même aux jeunes les plus vulnérables et qui n’ont qu’un bagage scolaire limité – une opportunité de s’insérer dans le monde du travail et dans la société.
Les organisations qui s’investissent dans la promotion de la formation professionnelle doivent elles aussi apprendre de leurs erreurs, faire preuve de persévérance, de volonté et d’innovation. Mais cela en vaut la peine, car donner aux jeunes une opportunité de formation, c’est investir dans le futur.
Article rédigé par Alessandra Genini, tiré du journal Terre des Hommes Suisse n°125, mars 2017