Manger en quantité suffisante, de façon saine et variée, un droit qui semble aller de soi. Et pourtant. Terre des Hommes Suisse anime un atelier sur le droit à l’alimentation afin sensibiliser les écoliers genevois.
Manger en quantité suffisante, de façon saine et variée, un droit qui semble aller de soi. Et pourtant. Alors que la presse parle de famines sans précédent aussi bien que d’obésité, Terre des Hommes Suisse anime un atelier sur le droit à l’alimentation afin sensibiliser les écoliers genevois à la problématique.
Prendre conscience des différences et des possibilités
Assis par terre autour d’un grand disque représentant les différents groupes alimentaires, des enfants d’une classe de 8P de l’école du Lignon à Genève s’activent pour classer des cartes plastifiées sur lesquelles des aliments sont dessinés. Il s’agit de réfléchir aux différences de mode de consommation entre une famille paysanne suisse et une famille paysanne des Andes péruviennes. Alors que le disque helvète regorge de denrées en tout genre, le disque péruvien est essentiellement constitué de céréales et de pommes de terres. Si Mathieu trouve que «là-bas ils ont trop de chance parce qu’ils sont pas obligés de manger des légumes tous les jours», il reconnaît quand même que «manger tout le temps la même chose ça doit être ennuyant à la fin».
Le but de l’exercice est de montrer aux enfants qu’en Suisse il existe un choix très varié et que leur réalité peut parfois être bien différente de celle d’enfants vivant à d’autres endroits du globe. Il s’agit également de leur faire comprendre que si la palette des aliments auxquels ils ont accès est très large, ce n’est pas sans conséquences. Manger des légumes d’été en plein hiver a des implications auxquelles on ne pense pas forcément au moment de faire ses courses. Avec l’activité suivante qui présente le voyage d’une tomate de son lieu de production aux étals de nos magasins, les élèves prennent conscience de l’impact environnemental mais également social et économique que peut avoir un acte qui semble aussi anodin que l’achat d’une tomate venue d’Espagne.
Permettre aux enfants d’agir
Mis en place par l’équipe pédagogique de Terre des Hommes Suisse, cet atelier permet donc d’aborder le thème de la consommation et du développement durable avec les plus jeunes en suscitant chez eux l’envie de comprendre et d’agir.
«La force de l’atelier est de donner des clés qui permettent aux enfants et aux adolescents de réfléchir non seulement à leur mode d’achat et de consommation mais également d’agir de façon très concrète», explique Kayla Jenni, collaboratrice du programme Suisse. «Aborder la question des labels permet par exemple de montrer aux élèves qu’il est possible de faire des choix responsables et de limiter leur impact négatif grâce à des actions facilement réalisables.»
Des salles de classe à la ferme
Le deuxième volet de l’atelier se passe quant à lui à la ferme de Budé avec qui Terre des Hommes Suisse a mis en place un partenariat. Une manière très concrète pour les jeunes de se rendre compte d’où viennent les aliments, mais aussi de renouer avec certains légumes auxquels ils sont parfois peu habitués. C’est également un moyen de leur proposer une alternative aux supermarchés puisque favoriser les circuits courts en mangeant local et de saison est l’une des clés pour consommer de façon plus éthique.
Tous au jardin
Alors qu’il est encore tôt, dans la grande et belle cour de la ferme de Budé, une vingtaine d’enfants se presse autour d’Hugo et Emilie, les animateurs de cette matinée un peu spéciale. Au programme: visite du jardin, goûter de la ferme et désherbage.
Explorer le jardin est l’occasion pour les enfants de goûter, tout crus et à peine cueillis, des légumes et des herbes qu’ils ne connaissent par forcément. Ciboulette, pois mange tout, fenouil, petits pois, «zaricots» mais aussi fleurs de capucine et choux Kale font l’objet d’une dégustation attentive. Tandis que certains trouvent ça «trop bon», d’autres font mine de vomir. «Et ça, c’est quoi?» demande Hugo. «Du persil!» répondent en cœurs les enfants. «Exact! Et est-ce que vous saviez qu’il y avait plus de vitamine C dans le persil que dans une orange?». La dégustation est prétexte à explications détaillées. Il s’agit de sensibiliser les jeunes et de répondre à leurs questions. «Pourquoi est-ce qu’il y a des fleurs au milieu des légumes?» demande Daniel. «Parce que cette variété de fleurs, les capucines, attirent les pucerons, explique Emilie. En planter à différents endroits du jardin permet d’éviter que ces petits insectes qui font des ravages s’attaquent aux autres plantes que les paysans souhaitent cultiver».
Tout en haut du jardin, sur le chemin qui longe l’enclot des moutons, Kaya, 10 ans, s’exclame: «Regardez, un hérisson mort!». Les enfants se précipitent et s’agglutinent autour de la petite bête qui a visiblement été attaquée par un renard ou par un chat. «Le pauvre quand même, il était petit» s’attriste la fillette. Emilie explique que les hérissons sont très utiles pour le jardin puisqu’ils mangent les limaces et les gros insectes. «C’est triste mais c’est aussi ça, la vie à la ferme».
Après un goûter 100% Budé (du jus de poire, des carottes et du colrave du jardin) les enfants sont prêts à aller travailler. Munis de gants, ils se répartissent sur les différentes bandes où poussent des haricots. Soudain, un élève s’écrie: «il y a un mille paaaaaattes sur ma plante, je fais quoi?» Emilie rigole. «Rien, tu le laisses tranquille, il partira tout seul». Si au début certains rechignent à mettre les mains dans la terre, rapidement tous sont très fiers de déterrer, racines comprises, les mauvaises herbes qui poussent entre les plans de haricots. «Au moment de mettre la main à la pâte, il arrive souvent que certains enfants, parfois un peu turbulents en classe, se révèlent particulièrement appliqués et impliqués par ce qu’ils font» explique Hugo. De quoi faire, peut-être, naître des vocations chez ces petits urbains!
Entre février et juin 2017, 51 classes de 16 écoles différentes auront été sensibilisées à travers ces animations. Au total, près de 1000 élèves auront pu réfléchir à la thématique du droit à l’alimentation, dans l’esprit de solidarité cher à Terre des Hommes Suisse.
par Chloé Hofmann, juin 2017