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Vue de la Ladera avec le barrio de Los Chorros au fond.

Cali / 21-23 octobre 2013

Des champs de canne à sucre (propriété de gros exploitants) à perte de vue qui encerclent la ville, voilà la première impression que nous offre Cali avant d’atterrir.

Cali, j’en avais entendu parler comme capitale de la salsa. En à peine une après-midi, je découvre une toute autre réalité: deux mondes qui se côtoient et qui vivent dans une inégalité criante. Dans cette ville de 2’500’000 habitants, presque la moitié vit dans des «barrios» populaires, quartiers aux constructions précaires où survivent les familles les plus défavorisées. La majorité sont des déplacés suite au conflit armé qui n’ont cessé d’arriver, à différentes proportions, depuis ces 20 dernières années.

Vue de la Ladera avec le barrio de Los Chorros au fond.

 

Le quartier de Los Chorros, perché sur la Ladera (une colline qui longe la ville au sud-ouest), compte une importante population déplacée, provenant principalement des montagnes du sud de la Colombie (Nariño, Cauca, Putumayo), plutôt d’origine indigène.

De l’extérieur, une certaine apparence de «calme», chacun semble vaquer à ses occupations. Quelques discussions suffisent à ébrécher cette impression. La violence dans ces quartiers est quotidienne, surtout auprès des jeunes: trafic de drogue et consommation, prostitution infantile, contrôle du territoire exercé par des bandes criminelles (Bacrim) reliques des paramilitaires… On nous raconte qu’il est dangereux de traîner «en las esquinas» (aux coins de rue), cela expose les jeunes à toute sortes de dangers, desquels la police ne les protège pas.

Lors de notre visite, une réappropriation du quartier par les jeunes a lieu. Un cortège d’enfants, parti du centre populaire de Cecucol et accompagné de parents et d’éducateurs, se déplace aux différents points stratégiques du quartier (terrain de foot, parc pour enfants, etc.) pour y réaliser danses, acrobaties et revendiquer ainsi dans une dynamique positive leur droit à pouvoir vivre dans le quartier en sécurité. Des banderoles avec des slogans sont accolées aux murs. Une petite fille, pas plus de 9 ans, me tend en souriant une feuille avec des revendications des droits de l’enfant, elle la remet également aux adultes présents lors du cortège. Cette marche groupée, ponctuées d’arrêts où les enfants profitent pour danser et faire des acrobaties sur fond musical, offre la sécurité due au groupe sans laquelle il serait improbable de pouvoir traverser tranquillement ce «barrio».

 

Quartier de Los Chorros

Les jours suivants, nous entrons dans le quartier d’Aguablanca, au sud-est de Cali. Des 500’000 habitants, 250’000 sont des déplacés du Chocó (un des départements le plus pauvre de Colombie et principalement d’origine afro), presque le double de la population Quibdo, sa capitale, qui compte elle 150’000 personnes. Les lotissements minuscules attribués aux familles sont divisés en secteurs. Les jeunes nous expliquent que les secteurs forment des frontières invisibles, il n’est pas possible de les traverser au risque de se faire agresser, et souvent pire. Ils n’ont pas la liberté de circuler dans leur ville, certains meurent sans être jamais sorti de ce quartier d’Aguablanca pour aller au centre-ville. Ici, les adolescents sont particulièrement vulnérables, souvent hors système scolaire ou en difficulté. Pourtant, au cours d’une discussion un des jeunes nous lance avec un grand sourire: «Si uno quiere, todo se puede» (Si on le veut, tout est possible)!