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Diobass – Gounghin – 2.12.2014

Nous voici de retour à Kaya dans la région des sites d’orpaillage. En empruntant des pistes fréquentées par quelques rares charrettes, nous nous rendons au village de Gounghin. Les concessions (un espace clos par un mur, dans lequel se trouvent les diverses maisons d’habitation, les greniers pour conserver la récolte ainsi que la cour où les femmes préparent les repas) constituent le lieu de vie d’une famille élargie. Elles sont dispersées sur un vaste territoire, chacune au centre des terres agricoles qui en dépendent. Les récoltes sont maintenant terminées et les friches servent de pâtures aux divers animaux.

A l’école, nous assistons à un cours dans la classe de CM2 qui, comme les autres classes, comporte plus de 50 élèves, âgés de 11 à 15 ans. Ce qui frappe, c’est l’équipement rudimentaire de ces classes, des démarches pédagogiques où l’élève reste essentiellement passif et le fait que les élèves montrent une maîtrise très relative du français, langue d’enseignement, au terme du cycle primaire. Le manque d’enseignants en cette rentrée scolaire bouleversée par les événements politiques a empêché l’ouverture de certaines classes. A l’évidence, les enseignants effectuent un travail remarquable dans ce contexte difficile, mais on peut se demander quelles perspectives offre le système scolaire en milieu rural, sachant que l’entrée dans l’enseignement secondaire pose de sérieux problèmes: éloignement, nécessité de trouver un «tuteur» pour loger l’enfant durant la semaine, frais annexes trop élevés pour des familles souvent nombreuses. La discussion que nous avons pu avoir avec l’enseignant nous a confirmé le fait qu’un enfant qui quitte l’école pour les sites d’orpaillage n’y revient pratiquement jamais.

Après une rencontre officielle avec le chef du village et les membres de la communauté villageoise, nous nous sommes rendus dans deux familles pour nous entretenir avec des jeunes qui ont fréquenté ou fréquentent des sites d’orpaillage. Ce qui ne peut laisser indifférent, c’est l’extrême dénuement dans lequel vivent ces familles et les signes évidents de malnutrition présents chez de nombreux enfants.

 L'école de Oumarou, ancien chercheur d'or||

Le premier jeune que nous avons rencontré s’appelle Oumarou. Il a suivi l’école jusqu’en CM2. Il a réussi l’examen de fin d’école élémentaire, mais échoué à celui d’entrée au collège. Il s’est donc rendu sur le site d’orpaillage proche de son village avec ses deux grands frères pour effectuer divers travaux: vente d’eau et de bois, préparation des repas, extraction du minerai, concassage. Mais, contrairement à la plupart de ses camarades, il a compris que cette situation ne pouvait constituer pour lui une solution à long terme. Il a décidé de refaire le CM2. Comme il a 17 ans et qu’un jeune ne peut rester dans le cycle élémentaire au-delà de 14 ans,  il a dû se rendre à l’état civil pour faire baisser son âge officiel. Surprenante pour nous, la suspension d’âge est une pratique assez courante au Burkina Faso. Au terme de cette année scolaire, il espère réussir l’examen d’entrée en 6e et rêve de devenir médecin. Mais il paraît évident que de nombreux obstacles se présenteront encore sur sa route.

Le parcours atypique d'Oumarou: de la mine à l'école||

Mariam a 14 ans. Durant l’hivernage (saison des pluies durant laquelle se déroulent la plupart des activités agricoles), elle participe aux travaux des champs. Le reste de l’année, elle se rend sur le site d’orpaillage avec sa mère pour concasser et laver la terre de laquelle sera extraite la poussière d’or. Les revenus qu’elle en retire sont modestes et fluctuants, mais que faire d’autre quand on vit dans un village perdu au milieu de la campagne. Elle rêve d’aller à l’école, mais les charges familiales (elle doit entre autre s’occuper de ses deux frères jumeaux âgés de 4 ans) et les préjugés liés aux filles ne lui permettront certainement jamais de concrétiser ce rêve.

Mariam prépare à manger pour ses deux petits frères et sa maman||

Cette visite et ces rencontres nous ont véritablement interpellés. Quel avenir imaginer pour tous ces enfants qui nous ont observés avec curiosité et un rien de méfiance (certains petits, à notre vue, se sont enfuis en hurlant, les seuls blancs qu’ils ont rencontrés étant des infirmiers qui étaient venus leur faire des vaccins)? Dans une société où les activités agricoles occupent encore plus de 70% de la population, où les pratiques culturales génèrent des revenus plus que modestes, où les autres secteurs économiques offrent encore peu de débouchés, où les traditions ancestrales restent très prégnantes, les perspectives paraissent bien limitées.