Des ateliers de consultation ont été menés auprès de centaines d’enfants et de jeunes au sein des différentes organisations partenaires de Terre des Hommes Suisse dans ses neuf pays d’action.
Depuis plus d’un an, des ateliers de consultation ont été menés auprès d’enfants et de jeunes au sein des différentes organisations partenaires de Terre des Hommes Suisse dans ses neuf pays d’action. Des centaines de jeunes ont ainsi pu témoigner de l’importance de cette approche.
Les dires des enfants et jeunes, entendus lors des ateliers de consultation, ont fait ressortir l’importance qu’ils accordent au droit à la participation, à l’écoute et à la disponibilité des adultes. «On est contents car vous avez pris le temps de faire tout ça, de jouer avec nous et de nous écouter!» «Nous avons fait sortir beaucoup d’idées!» «On a appris de nouvelles choses avec les autres enfants.» «L’atelier nous a permis de connaitre ce qui nous empêche de participer.» Ces commentaires proviennent de jeunes adolescents, âgés de 10 à 16 ans, réunis en octobre dernier à Dakar au Sénégal (voir sur www.terredeshommessuisse.ch/senegal). Ils reflètent l’avis de centaines d’enfants consultés depuis plus d’une année dans les différents pays d’action.
Cet état des lieux général a relevé, chez la majorité des partenaires, l’existence de pratiques en matière de participation infanto-juvénile. Il avait comme objectif non seulement de valoriser et de capitaliser les bonnes pratiques, d’impulser des dynamiques d’échanges et d’apprentissages entre les régions, mais également d’identifier les axes de progression et de mettre en place des formations continues visant à renforcer les pratiques des partenaires autour de la participation infanto-juvénile.
Les jeunes s’expriment et proposent
Avant tout, cet état des lieux accordait une place cruciale aux perceptions des enfants et des jeunes sur la réalisation du droit à la participation, par le biais d’ateliers de consultation composés d’activités ludiques et participatives. Recueillir la parole des enfants permet notamment de mieux comprendre leurs besoins et de trouver ensemble des solutions afin d’améliorer la qualité des prestations qui leur sont dédiées. Car qui est mieux placé, sinon les enfants, pour connaître les problématiques qui les concernent et en témoigner.
Ainsi, à travers des jeux, du dessin, des supports imagés, ils ont pu identifier les leviers et les freins à leur participation, énoncer les différents milieux de vie (famille, école, communauté) favorables ou défavorable à la réalisation de leur droit, et ont pu témoigner des émotions positives qu’ils ressentent lorsqu’ils ont l’opportunité de faire entendre leur voix et de participer à des décisions qui les concernent. « Je suis content car je sais que mon avis est pris en compte. » « Ça me donne du courage et l’envie de donner mon avis tout le temps!» «Quand je suis consulté, je me sens plus responsable.» «Je me sens à l’aise, même si je fais des erreurs, ce n’est pas grave parce que je me sens écouté.» «Ça nous permet de nous relever à chaque fois que l’on chute.» «Nos idées peuvent être apportées ailleurs, cela rend fiers nos parents.»
De manière générale, les enfants et les jeunes ont affirmé vouloir donner leurs opinions sans être jugés, avoir accès à des informations sur les projets ou sur des problématiques de la vie quotidienne, être davantage responsabilisé sur certains sujets qui les intéressent. Le tout dans un espace sécurisant où ils peuvent être soutenus et conseillés par des adultes bienveillants qui savent écouter.
Dalila* raconte avec fierté qu’elle a pu organiser et gérer des activités avec d’autres jeunes, parfois accompagnée d’adultes. L’occasion d’expérimenter, d’apprendre à parler en public ou devant des autorités, de savoir se protéger, de revendiquer des droits à travers des activités socioculturelles (pièces de théâtre, poésie, chant, danse), de réfléchir, de sensibiliser ses pairs sur des thématiques importantes et de s’amuser.
Nombre de réponses des enfants ont reflété leur maturité. En effet, ils sont conscients de l’importance de sensibiliser et d’impliquer les familles et les autres membres de leur communauté pour garantir leur participation effective. Lire par exemple l’action des jeunes au Brésil, en Haïti ou en Inde.
Renforcer les compétences des adultes
Du côté des partenaires, l’exercice a été enrichissant et formateur. Tous affirment que les consultations ont demandé du temps et de l’énergie, mais que les réponses des enfants ont, de loin, dépassé leurs attentes initiales. Les partenaires se sont ensuite accordés sur la nécessité du renforcement des compétences des équipes d’animateurs liées à une approche participative basée sur les enfants. Ces formations seront lancées dans le courant de l’année.
En effet, faire connaître aux enfants leur droit à la participation selon la Convention relative aux droits de l’enfant leur permet certes de prendre conscience de l’importance de leurs opinions et de leur pouvoir d’influence sur le cours des choses. Il faut cependant, pour que ce droit soit réellement effectif, que les adultes professionnels qui gravitent autour d’eux comprennent l’importance de la mise en place d’une approche participative dans l’ensemble des interactions, des pratiques, des espaces partagés, des processus de prises de décision, des domaines d’action liée à la vie et au développement des enfants. Que ce soit dans les domaines de l’éducation, de la protection, de la santé, l’écoute, le dialogue, la coopération sont des compétences interpersonnelles qui ne sont pas innées et qui méritent d’être développées par les adultes qui travaillent ou qui vivent avec les enfants, afin qu’ils puissent les intégrer dans leurs pratiques quotidiennes.
Lors des sessions avec les adultes professionnels, de nombreuses questions ont été débattues sur le contexte régional, le projet, la collaboration avec l’entourage familial et communautaire, les compétences psychosociales des enfants et des jeunes, ainsi que sur les facteurs limitant ou favorisant la participation. Pour Fatima*, travailleuse sociale à EDEN, l’un des partenaires de Terre des Hommes Suisse au Sénégal, «la participation permet de renforcer le vivre-ensemble, de développer le sens de la responsabilité, la solidarité collective et l’exercice de l’esprit citoyen dès le plus jeune âge. Je suis persuadée que l’expérience de la participation joue un rôle crucial dans le développement des enfants en augmentant l’estime de soi et en aidant à la construction du soi.»
Version complète de l’article paru dans le journal Terre des Hommes Suisse n°133, mars 2019, rédigé par Marie-Thérèse Maruri
*Prénom d’emprunt, selon notre politique de protection de l’enfance.
Exemples d’activités proposées lors des ateliers aux enfants et aux jeunes
La montgolfière permet d’explorer la compréhension des enfants et des jeunes sur leur participation significative au sein du projet mené par l’organisation partenaire de Terre des Hommes Suisse. Les segments de couleur de la montgolfière représentent les composantes et les formes de la participation des enfants : leur signification de la liberté d’expressions, les situations de la vie quotidienne où ils se sentent écoutés et où ils peuvent exprimer leurs opinions librement. Les crochets représentent les obstacles ou les entraves, et les flèches qui vont vers le haut les éléments favorables.
Deux autres activités permettent aux enfants et aux jeunes de partager leurs opinions à propos des opportunités actuelles de participation durant les différentes étapes du projet, d’en identifier les forces et les faiblesses, et de suggérer des améliorations.
Les feux de signalisation (pour les plus âgés): sur un tableau, en fonction des questions qu’on leur pose, les enfants placent des fiches rouges (non je ne participe pas), vertes (oui je participe) ou jaunes (je participe parfois/un petit peu).
Le «H» (pour les plus âgés): les participants pensent, discutent et listent leurs idées. Sous le bonhomme qui sourit, les aspects positifs, forces ou succès; sous le bonhomme qui est triste, les aspects négatifs, challenges ou menaces, et sous le symbole de l’ampoule, les suggestions pour améliorer la participation des enfants et jeunes au sein des projets/activités du partenaire.
Le concepteur d’évaluation (pour les plus jeunes, 8-13 ans): cet outil a pour but d’évaluer les effets de la participation sur les enfants. Il permet aux enfants d’évaluer les différents aspects d’un projet. Un bonhomme est dessiné sur un tableau. Sur la tête, l’animateur trace un chapeau et demande aux enfants ce qu’ils apprennent/ont appris via leur participation dans le projet. L’oreille, comment ils apprennent/ont appris à écouter et s’ils sont écoutés. Avec la bouche, quand et comment ils peuvent donner leur point de vue. Au cœur, ce qu’ils aiment/ont aimé à propos du projet. Aux pieds il dessine une poubelle, ce qu’ils refusent ou critiquent du projet. Enfin à la main, il dessine une boîte à outils où les enfants peuvent signaler toutes les compétences, les autres bonnes choses qu’ils retirent du projet ainsi que toutes leurs nouvelles idées.