Une nouvelle loi défend les droits des jeunes travailleurs tout en promouvant l’éducation et la santé.
Musicien à 11 ans dans un cimetière de Cochabamba… une situation à éviter! Mais en attendant, une nouvelle loi défend les droits des jeunes travailleurs tout en promouvant l’éducation et la santé.
Tous les enfants aiment jouer.
Je suis un enfant
et je viens travailler.
C’est ça ma vie, mais
c’est comme ça la vie.
Et pour y arriver je dois lutter.
Ces paroles sont extraites d’une chanson écrite et composée, avec l’appui de Maria, éducatrice sociale, par les enfants et adolescents travailleurs (Nats) de Sacaba à Cochabamba. À l’image de Félix, 11 ans, ils gagnent leur vie comme musiciens et prieurs pour les familles qui viennent honorer leurs défunts dans le cimetière de Sacaba. Ils entretiennent également les tombes. En général, ils consacrent une moitié de la journée au travail et l’autre à l’école. Dans le contexte bolivien qui tend aujourd’hui à octroyer plus de droits aux enfants travailleurs, la scolarisation est une garantie non négociable pour permettre aux jeunes de se réaliser, au-delà des contraintes familiales et sociales de leur quotidien.
L’accompagnement des enfants dans ce processus par les éducateurs de Audio Visuales Educativos (Ave), partenaire de Terre des Hommes Suisse, permet à certains jeunes de s’exprimer et de prendre conscience des enjeux. «Mes parents sont agriculteurs et travaillent toute la journée aux champs. Moi, plus tard, j’aimerais peut-être faire carrière dans l’armée. Mais pour ça, mes frères aînés m’ont dit qu’il était très important que j’aille à l’école et que j’étudie. Eux ont échoué et ont quitté l’école assez tôt. Aujourd’hui, ils insistent pour que je ne fasse pas la même erreur», témoigne Félix.
Une victoire vers plus de droits
En février dernier, la conseillère municipale de Sacaba et le représentant de la defensoria (centre d’écoute et de plaintes, lié aux droits de l’enfant) ont pu entendre entièrement la chanson des Nats lors d’une réception ayant pour but de remettre l’ordonnance qui engage la municipalité à reconnaître et à valoriser les enfants travailleurs, à respecter leurs droits et à leur offrir une série de services gratuits comme l’accès à la santé, l’écolage, l’entrée à la bibliothèque, etc.
Cette première reconnaissance, acquise avec l’appui de Ave, n’était cependant pas une fin en soi pour les Nats qui souhaitent voir cette ordonnance officiellement promulguée afin qu’elle puisse entrer en vigueur. C’est chose faite désormais!
«Ainsi, de catégorie délaissée par les autorités locales, ils se sont convertis en alliés stratégiques de la municipalité et font face à leurs défis de façon plus concertée et solidaire», commente Helen Alvarez, journaliste locale indépendante.
Une telle conquête a été rendue possible grâce à l’intégration des Nats au conseil infantile de Sacaba créé spécialement l’an passé pour rappeler la journée de l’enfance. De nombreuses propositions ont ainsi pu être déposées au conseil municipal, et cette nouvelle dynamique a permis l’élaboration de cette ordonnance, en collaboration étroite avec la defensoria de l’enfance et de l’adolescence. La voie est désormais ouverte à de futurs acquis sociaux.
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La Bolivie a ratifié cette année deux documents importants. 1. Le troisième protocole facultatif de la Convention relative aux droits de l’enfant, qui permet notamment aux jeunes de dénoncer les cas de violation auprès du Comité des droits de l’enfant. 2. La feuille de route nationale pour l’élimination de la violence à l’encontre des enfants et des jeunes, un instrument national élaboré par la Coalition nationale des droits de l’enfant et des adolescents, plate-forme de 33 organisations non gouvernementales à laquelle participe activement Terre des Hommes Suisse.
Article rédigé par Grégory Scalena, tiré du journal Terre des Hommes Suisse n°117, décembre 2014