Lutter pour l’amélioration des conditions de travail des jeunes aides familiales et prévenir l’exode rural.
Comme d’autres pays en voie de développement, le Mali est confronté à un problème aux lourdes conséquences humaines: l’exode rural des jeunes filles. Les raisons qui poussent chaque année des milliers d’entre elles à quitter leur foyer sont multiples: gagner de l’argent pour se constituer un trousseau de mariage (qui représente un budget de 150 000 francs CFA, soit environ 300 francs suisses, dans un pays ou le revenu mensuel moyen est d’environ 50 francs suisses), soutenir leur famille ou éviter un mariage forcé.
Engagées auprès de familles citadines, les aides familiales s’occupent du ménage, font les achats au marché, préparent à manger. Ceci n’est, hélas, pas sans risque: les cas de violences et d’abus sexuels au sein des familles d’accueil sont fréquents et des grossesses non désirées surviennent; les salaires sont versés de manière irrégulière, voire pas du tout. Quant aux conditions d’hébergement et de nutrition, elles s’apparentent souvent à de l’esclavagisme moderne.
L’action de Terre des Hommes Suisse
Terre des Hommes Suisse lutte pour l’amélioration des conditions de vie et de travail de ces aides familiales. Elle œuvre également en amont, afin de prévenir le départ des jeunes filles des campagnes vers la ville.
Son projet au Mali, mené en partenariat avec l’Apsef, repose sur 2 piliers:
- Amélioration des conditions de travail des aides familiales et promotion de leurs droits
À Bamako, la capitale du Mali, Terre des Hommes apporte une aide concrète à une cinquantaine d’aides familiales, en incluant toutes les parties concernées :- Jeunes filles: par le biais de causeries et d’animations organisées dans différents quartiers de la capitale, l’association sensibilise ces jeunes filles à leurs droits et devoirs, et aux moyens existants pour dénoncer d’éventuels abus. Grâce à la création d’associations d’aides familiales, les filles domestiques se chargent en première ligne de la promotion et de la défense de leurs droits. Cette stratégie permet aussi de renforcer l’estime de soi des jeunes filles.
- Employeurs et « grandes logeuses »: des causeries sont également organisées pour sensibiliser les employeurs des aides familiales à leurs devoirs et aux conséquences possibles des mauvais traitements. Les «grandes logeuses» sont aussi concernées. Ces femmes, qui hébergent les jeunes filles à leur arrivée en ville le temps de trouver une place d’aide familiale, sont aussi chargées de négocier et de distribuer leur salaire; elles jouent donc un rôle clé dans cette problématique.
- Prévention de l’exode rural des filles
La lutte contre les pires formes de travail passe également par la prévention de l’exode des filles plus jeunes. Terre des Hommes effectue donc un important travail auprès des candidates au départ et de leur famille, dans une trentaine de villages de la région de Koulikoro, au sud de Bamako.- Qui mieux qu’une ancienne aide familiale pour prévenir les plus jeunes des dangers qui les guettent à la ville et les décourager de partir? Le travail de sensibilisation dans les villages est réalisé par celles qui connaissent le mieux la problématique et sont le plus à même d’être écoutées par les autres filles et leur famille.
- En complément au travail de sensibilisation, il est nécessaire d’offrir aux familles des zones rurales la possibilité de développer des activités génératrices de revenus. Plus de 120 filles et leur mère ont ainsi bénéficié d’un soutien pour démarrer des activités économiques.
- Pour les jeunes des villages, le poids financier que représente la dot de mariage est conséquent et reflète certains déséquilibres dans les relations hommes-femmes. Les jeunes, filles et garçons, sont donc invités à dialoguer sur des thématiques de genre, ce qui est inhabituel dans les villages. Parmi les adultes aussi, les échanges sont vifs et engagés, et la parole libérée. Les hommes, bien que conscients de la difficulté pour les femmes de constituer leur trousseau du mariage, peinent à dépasser leurs schémas traditionnels. Et les femmes n’hésitent pas à interpeller directement les chefs du village pour leur faire part de leurs revendications!
Ces actions ont permis d’assurer une prise en charge adaptée des jeunes filles victimes d’abus. Elles leur ont aussi permis d’améliorer leurs conditions de logement, de bénéficier d’une pause de deux heures et d’ouvrir leur propre compte bancaire. Le travail de sensibilisation réalisé par les anciennes aides familiales et le soutien aux activités génératrices de revenu a aussi permis de limiter le nombre de candidates à l’exode: en 2014, seules 35 filles (sur 450 bénéficiaires) sont parties vers la ville.