À la suite de l’alerte internationale début mai 2020 sur la dégradation de la situation sécuritaire en Colombie, la communauté internationale a répondu aux inquiétudes légitimes de la population colombienne et des ONGs défendant les droits humains et la paix en Colombie. En Suisse, conseiller-ère-s aux États et nationaux ont rédigé une lettre adressée au Président colombien : Ivan Duque.
La Suisse, préoccupée par la situation, souhaite que les autorités colombiennes cessent toute forme de violence contre les manifestations publiques et, au contraire, que le gouvernement rétablisse un dialogue propice à la cohésion sociale et à l’établissement d’une paix durable.
Ci-dessous, la traduction de ladite lettre.
Monsieur le Président,
En tant que parlementaires engagés en faveur de l’éradication de la pauvreté, de l’intégration sociale et économique des populations marginalisées et de la paix, nous espérons depuis des années que la paix soit instaurée en Colombie et que des politiques publiques claires de lutte contre la pauvreté et d’intégration des populations marginalisées, notamment des peuples autochtones, renforcent la cohésion sociale et le bien-être de tou-te-s dans votre pays.
Nous voulons exprimer notre profonde inquiétude quant aux graves événements qui ont eu lieu pendant la grève nationale contre la réforme fiscale annoncée par votre gouvernement : il est fait état de 47 décès dus à des attaques de la police et de l’armée, d’environ 1 900 cas de violences policières, de plus de 450 blessés, de plus de 1 000 détentions dont la plupart ont fait l’objet de procédures arbitraires et de nombreux cas de torture ou de traitements cruels et inhumains, de 15 cas d’agressions sexuelles commises par la police et l’armée, d’environ 471 disparitions, dont deux assassinats, ainsi que de 58 agressions contre des défenseurs des droits humains et des journalistes, entre autres.
Les rapports de diverses sources s’accordent à dire qu’il y a eu un usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques, tout comme dans des cas d’actes de vandalisme ou de violence de la part des manifestants.
Nous sommes profondément attristés par toutes les personnes qui ont été tuées et blessées, dont au moins 3 mineurs qui ont perdu la vie, et 2 qui ont été victimes de violences sexuelles. Il est regrettable que des blessures permanentes subsistent chez chacun des survivants, ou dans les familles de ceux qui sont morts, et nous sommes alarmés par l’utilisation signalée d’armes à feu et d’autres armes létales et non létales au milieu de manifestations publiques et pacifiques.
Nous avons enregistré des informations faisant état d’attaques contre les défenseurs des droits humains, leurs commissions de vérification et même contre les délégations de l’ONU déployées sur le terrain. Il s’agit d’un message regrettable qui suscite l’inquiétude à l’heure d’une étape aussi cruciale que la signature et de la mise en œuvre de la paix dans votre pays qui bénéficie du ferme soutien du gouvernement suisse et de la communauté internationale en général.
Aujourd’hui, la demande généralisée de faire face à l’urgence, aux besoins économiques dans des conditions de bien-être et de dignité pour toute la population constitue un appel citoyen. Il est urgent de mettre fin immédiatement à l’usage arbitraire et excessif de la force pour éviter de nouvelles violations des droits humains de la population, et pour respecter et garantir les conditions d’exercice du droit des citoyens à manifester pacifiquement. Nous considérons également qu’il est très important que la justice ordinaire enquête sur les actes de violence et les éventuels abus de force et, surtout, que le sort des personnes disparues soit clarifié.
Nous considérons également qu’il est fondamental de promouvoir une Mission Internationale de Vérification Humanitaire qui tiendrait compte de la situation de la grève nationale et de ses multiples manifestations, et ainsi de rétablir un dialogue et une cohésion social réel pour atteindre efficacement le progrès social nécessaire qui est la seule garantie d’une paix sociale durable. Si une telle dynamique voit le jour, vous pouvez toujours compter sur nous, tant en Suisse qu’en Colombie.
Compte tenu de l’importance du renforcement des relations internationales dans le cadre de l’amitié et du soutien mutuel entre les États et les organisations multilatérales, nous considérons qu’il devrait être permis d’appliquer des mécanismes qui renforcent la démocratie, la paix et ses résultats sur l’ensemble du territoire national, comme l’ont affirmé divers acteurs tels que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits humains.
Enfin, le moment est sans précédent ; il permet de contribuer à la grandeur de l’Etat en ouvrant des espaces de négociations avec les personnes mobilisées dans le cadre de la grève nationale afin de revenir à une certaine forme de normalité qui assure le bienêtre de tous les secteurs de la population. Il s’agit de retrouver une certaine tranquillité, aussi économique, de la grande majorité et de renforcer la Paix, les droits humains et les progrès sociaux.
Avec toute la considération due,
Carlo Sommaruga, Conseiller aux Etats
Fabian Molina, Conseiller national
Marina Carobbio Guscetti, Conseillère aux Etats
Mattea Meyer, Conseillère nationale
Brigitte Crottaz, Conseillère nationale
Lisa Mazzone, Conseillère aux Etats
Christine Badertscher, Conseillère nationale
Christian Dandres, Conseiller national
Laurence Fehlmann Rielle, Conseillère nationale
Claudia Friedl, Conseillère nationale
Nicolas Walder, Conseiller national
Stéfanie Prezioso, Conseillère nationale
Ada Mara, Conseillère nationale
Denis De La Reusille, Conseiller national
Samira Marti, Conseillère nationale
Cédric Wermuth, Conseiller national