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Un peu d’histoire… et enjeux d’aujourd’hui pour le peuple Yanomami

Nous sommes dans l’Etat d’Amazonas, qui regroupe à lui seul 72 peuples indigènes. Les Yanomami sont l’un d’entre eux. Ils sont parmi les derniers peuples touchés par la civilisation, les contacts avec les «napë» (non-indigènes) datent seulement des années 40-50. Chasseurs-cueilleurs, semi-nomades, ils vivent en quasi autarcie. Leur territoire (90’000 km²) est l’un des premiers à avoir été démarqué il y a plus de 20 ans, mais comme pour les autres peuples indigènes, ils font face à une double difficulté: savoir comment se positionner comme peuple, et quel type de traditions et de société ils souhaitent entretenir et faire évoluer.

Portrait @Secoya
Face à eux, une nouvelle stratégie étatique d’occupation des terres: le Congrès national remet actuellement en question le processus de reconnaissance des territoires, rajoute des exceptions et ouvre la porte notamment aux industries minières. Une situation qui génère quotidiennement des tensions, des violences, des abus, des suicides…
Plus globalement dans la société brésilienne, les stéréotypes et discriminations des indigènes sont très forts, encouragés par la plupart des médias. Un discours qui caractérise les indigènes comme voleurs, paresseux, sales. On dira «arrête de faire l’indien» à un enfant qui fait une bêtise!

Autrefois, le peuple Yanomami était constitué de clans guerriers qui vivaient sur un immense territoire à cheval sur la frontière venezuelo-brésilienne. Ils appartenaient à 4 sous-groupes linguistiques distincts. Le contact des Yanomami avec le monde des blancs au XXe siècle a commencé par l’intrusion de coupeurs de caoutchouc ou chercheurs d’or. Ces contacts ont occasionné des épidémies dévastatrices, menaçant sérieusement la survie physique de toute la population. Pour agir notamment sur ces questions de santé sont «entrés» alors les missionnaires et autres évangélistes… et du coup également leur prosélytisme. L’avancée du monde blanc force les Yanomami à se structurer davantage comme un seul peuple et à s’ouvrir sur le monde extérieur: une question de survie physique comme culturelle. «L’objectif n’est évidemment pas de créer un zoo humain et de maintenir ce peuple dans d’antiques traditions qui ne leur correspondent plus, mais bien de promouvoir une vision critique de la société occidentale, de «traduire» les réalités auxquelles ils sont nouvellement confrontés, et de générer un processus d’autonomie qui leur permette d’appréhender le futur et de prendre des décisions en connaissance de cause» témoigne Silvio Cavuscens, coordinateur général de Secoya.

Départ à la chasse @Secoya

Encore aujourd’hui, les Yanomami vivent en groupes de 100 à 250 personnes selon un mode de vie traditionnel. Semi-nomades, ils tirent leur subsistance de la chasse, de la pêche, de la cueillette et d’un peu d’agriculture saisonnière (bananes, tabac, manioc, et quelques autres espèces exotiques). Il vivent la plus grande partie de l’année dans un village de base, dit xapono, principalement constitué de différentes «cases» familiales (chaque famille y aménage son espace privé: foyer, hamacs, etc.), placées de façon circulaire et ouvrant sur un espace central nu – totalement exempt de végétaux.

Gestion des déchets @Secoya

Plus récemment certains groupes ont développé des activités commerciales avec les napë: bananes, poissons, noix, mais aussi artisanat et fibres végétales.
Les conditions matérielles sont rudes, le milieu naturel, quoique bien connu des Yanomami, est dangereux, et l’espérance de vie ne dépasse pas une cinquantaine d’années!
Pres de 20’000 Yanomami brésiliens se concentrent dans les États d’Amazonas et du Roraima, et bénéficient d’un territoire continu, démarqué et protégé depuis 1991. Ils sont cependant toujours victimes d’abus divers et de pillages réguliers de leurs terres – on estime actuellement à environ 2000 le nombre de chercheurs d’or clandestins infiltrés sur le territoire Yanomami!

Les exactions sont nombreuses dans toute l’aire du Rio Negro, touchant de nombreux peuples indigènes. Des entreprises qui organisent des voyages pour Américains: pêche en rivière et prostitution de jeunes filles indigènes… des commerçants brésiliens qui s’offrent des jeunes filles contre de la nourriture ou des bijoux de pacotilles… les enseignants Yanomami qui contractuellement devraient être payés par l’Etat et ne reçoivent qu’une partie de leur salaire, et encore pas forcément tous les mois… ce n’est que quelques unes des mille et une histoires d’abus!