Nous voici installés pour plusieurs jours dans le village de Mundila, à 80 km de la capitale de l’Odisha, Bubaneshwar. 39 familles vivent dans ce village, au rythme de la culture du riz. La majorité de ces familles est issue de la tribu Malua Kandha, qui signifie peuple de la forêt. Même si elles conservent quelques traditions ancestrales, comme des rituels pour honorer la déesse de la forêt, ces familles ont pleinement intégré les rituels hindous dans leur vie quotidienne. Les femmes ont adopté bijoux et maquillage des hindous et le village est rythmé tout au long de l’année par les nombreuses festivités religieuses hindoues. Ces tribus restent toutefois discriminées, du fait de leur appartenance aux classes inférieures. 65 tribus sont recensées en Odisha et le gouvernement local a mis en place un système de quotas pour permettre à ces populations d’accéder à l’éducation et à des emplois dans l’administration.
Dans le village de Mundila, chaque famille est propriétaire d’un morceau de terre qui lui permet de cultiver du riz et parfois un potager. Ce qui n’est pas le cas par exemple des villages voisins où la population issue de la tribu Saara n’a aucun accès à la terre et se bat donc pour avoir un titre de reconnaissance pour la terre qu’elle exploite collectivement.
Pendant la période de la mousson, les travaux aux champs occupent les hommes et les femmes: labourer la terre, replanter les semis de riz, arracher les mauvaises herbes. 3 ou 4 mois après la plantation, la récolte pourra se faire. Les boeufs utilisés dans ce village ont été achetés par certaines familles grâce au micro-crédit organisé par le groupe de femmes. Elles prêtent ou louent leurs boeufs aux autres familles pendant la saison des travaux. A part ce travail, la vie des vaches en Inde est très tranquille et respectée ! Il y a même une journée dans l’année où les villageois remercient les vaches en leur offrant des colliers de fleurs et des gâteaux de riz et noix de coco. Le bonheur d’être une vache en terre indienne…
Dans ce village, les paysans, hommes et femmes, ont été formés à la technique du SRI (system of rice intensification) qui a de nombreux avantages par rapport à la méthode traditionnelle : économie de graines (2kg sont suffisants pour 1 acre, contre 40 kg habituellement), 50% de fertilisants en moins, un entretien du champ moins pénible (arrachage des mauvaises herbes facilité grâce aux rangées bien ordonnées des plants – cf photo), pour une production supérieure à 50% (25 à 30 sacs par acre, contre 18 habituellement). Cette méthode introduite par notre partenaire CARD depuis une dizaine d’années dans la zone a maintenant été adoptée par le gouvernement local qui s’occupe de l’étendre au niveau de tout l’Etat. Mais toutes les parcelles ne peuvent être cultivées avec ce système car l’eau ne doit pas stagner.
En parallèle de l’amélioration des conditions de vie des familles, CARD a mis en place dans chaque village un Child club. Plusieurs fois par semaine, tous les enfants du village, tribaux ou non tribaux, se réunissent pour parler et résoudre les problèmes identifiés par les enfants (améliorer la route d’accès au village, réparer la pompe à eau, empêcher les hommes de boire, lutter contre les moustiques). Ici ils dessinent les droits de l’enfant dont ils parlent régulièrement, et abordent des sujets sensibles comme le harcèlement sexuel, le mariage précoce avant 18 ans, le travail des enfants. Ils connaissent tous par coeur le téléphone de la Child line, ce numéro mis en place au niveau national pour alerter sur des cas de violations des droits de l’enfant.
Au sein du Child club, les enfants discutent aussi de leur rêve pour leur vie future: Pratima , sur cette photo, voudrait être docteur pour soigner les enfants, le petit Muna veut devenir ingénieur pour réparer et construire des voitures, Mamali rêve de devenir enseignante. Tous ont bien conscience que le chemin sera long pour y arriver, la majorité des enfants de ces villages arrêtant l’école après 15 ans pour se marier pour les filles ou travailler aux champs pour les garçons. Pour le moment, le child club de Mundila recherche un autre espace d’accueil, avec un vrai espace de jeu: les enfants iront voir les représentants du village pour en discuter.