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L’exploitation des employé-e-s de maison en Afrique de l’Ouest : un problème pas si « domestique » que cela !

Echappant aux radars, laissant quasiment indifférents les baromètres des observateurs des droits de l’homme, le problème de l’exploitation des employés domestiques – dont la grande majorité sont des femmes – est décidément un problème sur lequel les médias n’aiment pas s’attarder outre-mesure.

Encore moins s’attaquer.

 

On va jusqu’à affirmer que les problèmes du personnel domestique (femmes de ménage, nounous, jardiniers, chauffeurs) soient justement cela : des problèmes domestiques, voire des problèmes familiaux, les employé-e-s étant censé-e-s faire partie – comme on l’affirme naïvement ou par une certaine hypocrisie – de la famille de l’employeur, donc susceptibles de régler leurs désaccords, avec ce dernier, à l’intérieur de sa maison. 

Un sujet difficile que Terre des Hommes Suisse et ses partenaires n’entendent pas négliger

Sujet mal-aimé, problème « orphelin », le problème du traitement souvent inéquitable des travailleur-euse-s domestiques se pose avec beaucoup d’acuité tant dans les pays dits « développés » que dans bien de nombreux autres pays du monde. 

La situation est particulièrement préoccupante en Afrique de l’Ouest, l’une des zones d’intervention de Terre des Hommes Suisse. Soutenant depuis 2012 l’Association pour la promotion du droit et du bien-être de la famille (APSEF), c’est à travers cette ONG basée à Bamako que TdH Suisse s’attaque aux risques que prennent les jeunes Africaines quittant école et domicile familial pour travailler en ville comme « aides ».   

Les raisons de ce véritable exode rural féminin et dont, effectivement, le premier effet négatif est d’éloigner ces jeunes Maliennes de l’école (nombre d’entre elles ne terminent pas leur scolarisation), sont souvent très concrètes. Si elles ne sont pas poussées à partir travailler en ville par leurs propres familles, démunies et manquant souvent de l’essentiel, ces jeunes femmes, souvent adolescentes, s’y résolvent elles-mêmes, et pour les mêmes raisons  – acheter du matériel indispensable pour le travail de leurs parents ou se constituer un trousseau de mariage, le deuxième relevant d’une vieille tradition que les jeunes filles mettent un point d’honneur à respecter. Il y a aussi la naïveté : ces jeunes filles croient imminemment à leur « chance », celle qui, par un avantageux mariage dans la grande ville ou par la soudaine perspective d’un travail prestigieux (alors qu’elles viennent de quitter les bancs de l’école !), de loin meilleur à celui de la femme de ménage que les concernées s’apprêtent à devenir, va leur ouvrir les portes d’une vie rêvée et faire sortir définitivement leur famille de la misère.  

L'illusion d'une vie rêvée

Mais les espoirs que films et séries font miroiter à ces jeunes Africaines s’estompent rapidement et la réalité qui se dévoile devant elles est toute différente. Dans certains cas, elle peut même être celle d’un traitement dégradant qui va des insultes humiliantes et le harcèlement verbal aux agressions physiques (dont sexuelles) et la privation de nourriture, en passant par les fausses et abusives accusations de vol.

Et tout cela entre quatre murs bien épais et au cœur d’intérieurs feutrés d’où rien ne filtre. Ou si peu.

Les jeunes employées de maison maliennes à la découverte de leurs droits

La problématique des jeunes maliennes est une problématique complexe qui combine à elle seule plusieurs vulnérabilités que Terre des Hommes Suisse combat dans les pays où elle intervient : déscolarisation, risque d’exploitation au travail et violence contre les femmes.

En effet, l’APSEF qui cherche d’abord à infléchir, par un effort de dissuasion, la tendance à la déscolarisation volontaire et à la migration en ville, en mettant en garde les jeunes contre les risques d’une telle démarche. Pour celles qui s’y sont déjà engagées, l’APSEF déploie toute une activité d’information et de conseil qui aide les employées domestiques à mieux connaître et à exercer leurs droits, évitant ainsi au maximum le danger d’exploitation et la série d’abus qui accompagnent leur travail. Ce qui est d’autant plus impératif qu’une grande partie d’elles sont des enfants…

En effet, une étude sur les Droits des travailleuses domestiques en Afrique de l’Ouest établissait, en 2021, que 31,37% de ces employées étaient âgées entre 12 et 15 ans et 64,7% entre 15 et 25 ans. Réalisée par le Centre de Recherche et d’Action sur les Droits économiques, Sociaux et Culturels (CRADESC) basé au Sénégal, cette étude réaffirmait officiellement la situation critique des « servantes » dans les pays d’Afrique de l’Ouest : surcharge de travail, absence de sécurité, traitements dégradants, salaires très bas. 

Ceci dit, non pas tous les employeur-euse-s d’aides ménagères sont des gens sans scrupules qui profitent de la condition vulnérable de leurs subordonnées – loin de là!  Un bon nombre d’entre eux/elles ont une attitude de respect envers  leur personnel de maison ou qui, tout simplement, respectent la loi.  

Car une législation sérieuse sur le travail existe dans de nombreux pays africains  et elle couvre la plupart des aspects de la problématique du personnel domestique.  Cette loi est claire: elle exige un contrat écrit indiquant un salaire minimum pour l’employé-e de maison, des jours de congé, une protection juridique. Les problèmes décrits plus haut proviennent plutôt de l’absence de contrôles systématiques pour garantir une application sans faille de la loi ainsi que,  de l’insuffisance, à cette étape – toujours pour cause de manque de moyens – d’initiatives de sensibilisation des employeurs-euses aux droits de leurs aides.  

La mission que se sont assignés Terre des Hommes Suisse et ses partenaires sur place a d’autant plus de valeur. Conseillant, orientant et éclairant les employées sur la législation et sur les droits qui en découlent pour elles, ces organisations poursuivent aussi un travail de sensibilisation auprès des employeur- euse-s formé-e-s à traiter désormais leurs aides ménagères comme des collaborateur-trice-s ayant leur place à la maison, leurs droits et leur valeur. Leur dignité.  


Un tel travail met frein aux abus. Plus que cela : il amène un changement profond des habitudes. Une transformation des mentalités.

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